• Le Parlement du Tchad

L’Assemblée nationale (AN), Parlement monocamérale du Tchad, était composée au départ de 188 membres élus en 2011 pour un mandat de quatre ans. Plusieurs fois reporté, son renouvellement n’a finalement pas eu lieu, jusqu'à ce que l'Assemblée soit dissoute par les autorités de transition en 2021 après avoir plus que doublé son mandat. Sous la Constitution de 2018, les compétences de l’AN comprenaient voter la loi, contrôler le Gouvernement, contrôler et évaluer les politiques publiques et représenter les populations sur la base d’un mandat représentatif. Cependant, elle ne disposait que d’outils limités pour influencer les décisions présidentielles. En cas de crises persistantes et bloquante entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif le Président de la République pouvait dissoudre l’AN, qu’en aucun cas ne pouvait renverser le Gouvernement par une motion de censure ni adopter une motion de défiance contre l’un de ses membres. Elle pouvait proposer des amendements aux projets de loi, mais le Gouvernement avait le droit de demander un vote bloqué sur son projet de loi initial ou avec les seuls amendements qu’il aurait acceptés. Un nombre exigu de proposition de loi avait été introduit depuis la mise en place de l’Assemblée. 

Comme déjà prévu dans la révision constitutionnelle de 2020, et réaffirmé par les recommandations du DNIS, le futur Parlement du Tchad, à la suite de la victoire du « oui » au référendum constitutionnel de décembre 2023, est bicaméral. En plus de la chambre basse, se voit créer une chambre haute, le Sénat, probablement issue des collectivités autonomes. En attendant que la composition et les attributions du futur Parlement du Tchad soient fixées par la nouvelle Constitution et par la loi, et que des élections législatives aient lieu, il est important de prévoir un appui conséquent à la toute nouvelle institution qui sera mise en place. Il semble pertinent de renforcer la capacité du personnel permanent dans un premier temps et des nouveaux députés par la suite, entre autres en légistique, contrôle parlementaire, fonction de représentation et TIC.

 

  • Le nouvel OGE, appelé Agence Nationale chargée de la Gestion des Élections (ANGE) 

L’ANGE est une nouvelle instance créée par l’adoption de la nouvelle Constitution à la suite du référendum du 17 décembre 2023. Elle vient remplacer de manière permanente la Commission électorale nationale indépendante (CENI) auparavant temporaire et placée sous l'autorité du gouvernement. Le changement de nom répond notamment à une demande exprimée lors du dialogue national inclusif. 

 

  • Le Bureau permanent des élections (BPE)

Le BPE est un organe permanent de nature hybride, rattaché au ministère de l’Administration du territoire en période non électorale, et placé par le passé sous l’autorité de la CENI en période électorale. Son organisation et ses attributions, déterminées par un décret pris sur proposition du Ministre, portent prioritairement sur le fichier des électeurs. Le directeur général du BPE a le rang d’un directeur général de l’administration publique. Fortement marginalisé lors de la mise en place de la CENI au moment de chaque élection, le BPE joue pourtant un rôle très important dans la logistique et la technique pré et post-électorale. Le BPE ne dispose pas des ressources nécessaires pour mener les activités de préparation des élections telles que prévues par l’actuel Code électoral, notamment tenir un fichier permanent des électeurs.

 

  • L’actuelle Cour suprême et/ou du futur Conseil constitutionnel

Dans l’architecture institutionnelle, depuis 2018, la Cour suprême a remplacé le Conseil constitutionnel en qualité de juridiction du contentieux électoral, et ses Chambres réunies sont désormais compétentes en matière d’élections. 

L’ancien Conseil constitutionnel était souvent considéré comme manquant d’indépendance dans la gestion du contentieux, ainsi que dans la gestion des résultats par ses décisions d’annulation de résultats des bureaux de vote. Quelle que soit la juridiction qui reprendra les attributions actuelles de la Cour suprême, les faibles performances passées des juges électoraux et la nouveauté de l'institution indiquent une possibilité de soutien.

La Cour suprême reçoit les candidatures à la Présidence de la République et notifie les éventuels rejets aux intéressés qui n’ont pas possibilité de recours. Les candidats aux élections législatives et locales, cependant, peuvent saisir la Cour suprême en cas de rejet de leur candidature par la CENI. La Cour arrête et publie les listes définitives des candidats. Elle doit recevoir des exemplaires des procès-verbaux de dépouillement des votes et contrôler la régularité des opérations. A partir de la proclamation provisoire des résultats, les Chambres réunies reçoivent des contestations et traitent le contentieux des élections présidentielles, législatives et locales, dont la Cour proclame les résultats définitifs. Un quitus de la Cour suprême est nécessaire à ce que les partis politiques puissent être remboursés d’une partie de leurs dépenses de campagne électorale. Tout candidat ou parti politique dispose d'un droit de recours auprès de la Cour suprême contre une suspension, de la part de la HAMA, de la diffusion d'une émission de la campagne officielle. La Cour suprême est censée faire un rapport annuel au Président de la République, devant être publié au Journal officiel. 

A l’issu de la refonte constitutionnelle et du référendum de décembre 2023, le Conseil constitutionnel a retrouvé son indépendance de la Cour suprême et exerce seul le contrôle de constitutionnalité des lois, des lois organiques, des décrets et des traités internationaux. Son contrôle s'effectue de manière automatique avant leur promulgation mais également à posteriori sur la base d'un contentieux transmis au Conseil par une cour ordinaire. Le Conseil juge également les contentieux en matière électorale, et fait prêter serment au président de la République nouvellement élu.

 

  • La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH)

La CNDH est une autorité indépendante, reformée en 2017 et constitutionnalisée en 2018, qui a pour mission de :

  • Promouvoir les droits de l’homme, 
  • Fournir des avis au Gouvernement, 
  • Engager des enquêtes sur les cas de violations, 
  • Mener des études et participer à la révision de la législation en vigueur et à l'élaboration de nouvelles normes relatives aux droits de l'homme. 

Elle dispose de 23 délégués provinciaux et est chargée, entre autres, de lutter contre le mariage précoce, le viol et les violences basées sur le genre ainsi que de sensibiliser l’opinion publique et les autorités politiques, administratives, militaires, traditionnelles et religieuses.

 Au vu de la multiplicité de ses tâches et de la grande importance de son travail, un appui à la CNDH lui permettra de mieux remplir sa mission tout en renforçant d'autres interventions prioritaires poursuivies par la présente action.

 

  • La Haute autorité des médias et de l'audiovisuel (HAMA)

La HAMA est une autorité administrative et indépendante instituée en 2018. Elle est chargée de veiller au respect des règles déontologiques, réguler l’accès et l’exercice de la profession de journaliste, assurer la liberté de la communication audiovisuelle et l’indépendance des médias de service public, veiller au respect des normes en matière de propagande politique et fixer les règles lors des campagnes électorales.  La structure dirigeante de la HAMA a été entièrement renouvelée début 2023. Étant donné sa fragilité vis-à-vis des instrumentalisations politiques et les ressources limitées dont elle dispose pour remplir son mandat, il est pertinent d’appuyer la HAMA pour soutenir un journalisme professionnel et objectif au Tchad.

 

  • La société civile

Elle est composée de nombreuses associations engagées dans la gouvernance, associations qui représentent les femmes, les jeunes et les groupes de personnes vivant en situation de vulnérabilité). Les organisations de la société civile (OSCs) sont caractérisées par leur forte vulnérabilité et peinent à mener à bien les activités citoyennes, notamment en périodes électorales. Par ailleurs, la capacité institutionnelle des organisations de la société civile reste faible au Tchad et leur espace d'expression a tendance à se réduire progressivement depuis plusieurs années.  

 

  • Les médias (publics, confessionnels, associatifs, communautaires, commerciales) dans leur rôle d'information et de sensibilisation concernant la démocratie, les droits et devoirs de la citoyenneté, les droits humains y compris l’aspect genre, et la participation civique. 

Depuis les années 1990, le paysage médiatique s’est considérablement élargi avec la présence de la presse privée, éliminant ainsi le monopole de la presse publique. La radio FM/Liberté, créée par des activistes des droits humains, est la plus écoutée dans la capitale, notamment pour son réseau de correspondants basé dans l’ensemble du pays. Toutefois, la situation politique et sécuritaire fait peser des risques importants sur l’exercice du journalisme. Il existe au Tchad 7 chaînes de télévision, 67 radios, 55 journaux et plusieurs médias en ligne. Les journalistes et les gestionnaires des radios ont besoin à la fois de renforcement des capacités et de soutien matériel.

 

  • Les autorités traditionnelles dans le renforcement de leur rôle en matière de prévention des conflits et médiation, ainsi que de sensibilisation aux droits des femmes et des filles. 

Les autorités traditionnelles et coutumières représentent un pouvoir moral et juridique institutionnalisé. Un Haut conseil des collectivités autonomes et des chefferies traditionnelles (HCCACT), en place depuis fin 2018, sera probablement remplacé par un nouvel organe dédié exclusivement aux chefferies traditionnelles L'Association des autorités coutumières et traditionnelles du Tchad (AACTT), opérationnelle depuis 1993, est censée promouvoir la médiation locale, notamment concernant les différends sur l'accès aux ressources naturelles.